GUIDES

« Je viens de voir que le cours du Bitcoin avait franchi la barre des 50 000€, j’aurais dû en acheter plus tôt, je vais me dépêcher d’en acheter avant les 60 000€ ». Aie, aie, aie… Sans même parler de la pertinence de cet investissement ou de la qualité de son sous-jacent, quelque chose alerte. Quoi donc ? La peur, la frustration, la précipitation, bref : l’émotion.

Emprunté à nos homologues anglophones, la FOMO (Fear of Missing Out) désigne « la peur de rater quelque chose ». Concrètement, la personne concernée est prise d’une sensation d’angoisse à l’idée de rater une opportunité : c’est la peur de ne pas faire. Ce phénomène, strictement psychologique, incite donc à des comportements impulsifs qui, sur un plan cartésien, peuvent être regrettables. La FOMO peut également être la source de certaines addictions (aux réseaux sociaux par exemple).

Ceci-dit, ce concept psychologique trouve naturellement une application dans l’univers des marchés financiers. Reprenons ensemble notre exemple introductif. Nous vous invitons à remplacer « Bitcoin » par quelconque action détenue dans votre portefeuille, par une autre cryptomonnaie, etc. Osez-donc nous jurer que vous n’avez jamais été confrontés à ce phénomène dans votre parcours d’investisseur ? Pourquoi pouvons-nous l’affirmer avec une telle assurance ? Car nous non plus, nous n’avons pas été épargnés. Ce n’est pas grave, il faut maintenant savoir l’identifier. Mieux vaut prévenir que guérir, pas vrai ?

En tant que phénomène purement psychologique, il est possible d’essayer de déceler des traces de FOMO aussi bien à l’échelle de l’individu que sur l’ensemble des marchés.

Sur le plan individuel, la FOMO peut être décelée à partir du strict comportement de la personne concernée. On remarque plusieurs habitudes néfastes parmi les « malades chroniques ».

• Ces personnes ont d’abord tendance à surveiller constamment les réseaux sociaux, de peur de manquer une information économique ou financière qu’il jugerait capitale. X (anciennement Twitter) en est plutôt un bon exemple.
• Également, ces personnes ont une forte tendance à se comparer à leurs pairs. L’idée derrière étant de « se rassurer » sur nos choix par le prisme de ceux des autres. Vous n’avez jamais cherché à connaître le prix de revient de votre ami, histoire de s’assurer que vous avez bien acheté « moins cher que lui » ?  
• Enfin (et c’est le plus gros symptôme), ces personnes sont toujours anxieuses à l’heure de prendre une décision. Ni plus, ni moins.

Sur le plan « sociétal », la FOMO peut être décelée par simple agrégation des décisions individuelles. Simplement, si chacun, à son échelle, décide de passer à l’achat par pure FOMO, le cours de l’actif concerné s’envole. Attention tout de même, un cours qui s’envole n’est pas toujours la conséquence de phénomènes psychologiques néfastes. Par exemple, une publication de résultats peut amener l’explosion du cours de bourse d’une société, si ces résultats sont excellents. C’est là toute la difficulté : établir lorsqu’un cours de bourse s’envole de manière fondamentalement injustifiée (les bulles, ça vous parle ?) 

Revenons ensemble sur un célèbre exemple des années 2000s : Cisco Systems. Fondée en 1984, l’entreprise informatique américaine est, à l’époque, spécialisée dans le matériel réseau. À partir de 1998, les marchés financiers « s’enflamment » autour de la dernière grande innovation : l’Internet.  Les cours des entreprises du secteur explosent, d’abord parce que le marché est extrêmement prometteur, mais ensuite une bulle se forme… Chaque jour, de nouveaux investisseurs rentrent sur les marchés financiers, propulsant les valeurs sur des sommets toujours plus hauts, attirant ainsi par pure « FOMO » de nouveaux investisseurs, etc… Puis, la bulle éclate. 

L’exemple de Cisco Systems l’illustre parfaitement. Le cours de l’action était passé de $10 à $80 entre 1998 et avril 2020, avant de chuter violemment jusqu’aux $18 en mars 2021, soit une baisse de plus de 75% !

Nous vous voyons déjà venir chers lecteurs… Lorsque le cours d’un actif explose pour des raisons purement psychologiques et que le prix de l’actif concerné ne concorde plus avec les fondamentaux, ça donne envie de « shorter », pas vrai ? En réalité, « shorter » ce genre de bulle est très compliqué, notamment parce qu’il est quasi-impossible de déterminer le moment où la bulle explosera.

En guise de conseil, nous souhaitions vous rappeler l’adage suivant « ne pas trader, c’est trader ». Restons éloignés de ce genre de phénomènes quand nous parvenons à les déceler. Oublions le manque à gagner d’une vente à découvert, et concentrons-nous davantage à éviter de tomber nous-mêmes dans ces cercles vicieux. S’il faut savoir gagner, il faut aussi savoir ne pas perdre. À bon entendeur…